Newsletter N°4 – Juillet-Août-Septembre 2022

Jurisprudence :

  • Harcèlement managérial et pouvoir disciplinaire. —
  • Preuve de l’impossibilité de reclassement du salarié inapte. —
  • Inaptitude et reclassement. —
  • Inaptitude et indemnité spéciale de licenciement. —
  • Licenciement pour absence prolongée. —
  • Licenciement pour motif économique. —
  • Protection de la salariée enceinte pendant un arrêt maladie. —
  • Requalification de CDD en CDI. —
  • A travail égal, salaire égal. —
  • Paiement du salaire et prise d’acte. —
  • Droit à congés payés et preuve. —
  • Prime de vacances prévue par la Convention collective Syntec. —
  • Manquement à l’obligation de sécurité de l’employeur. —
  • Niveau de consultation du CSE. —
  • Consultation du CSE. —
  • Elections du CSE et loyauté des négociations du protocole d’accord préélectoral. —

Réglementation :

  • Loi 2022-1158 du 16 août 2022, JO du 17 août 2022, relative aux mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat. —
  • Loi 2022-1158 du 16 août 2022, JO du 17 août 2022, de finances rectificative pour 2022 prévoyant la possibilité pour les salariés de monétiser leurs jours de repos. —
  • Protection sociale complémentaire : allongement du délai de mise en conformité des accords collectifs Boss, Protection sociale complémentaire, § 1430,1er sept. 2022. —
  • Foire aux questions publiée le 5 septembre 2022 par le Ministère de la Transition énergétique relative au forfait mobilités durables. —

 

 

Jurisprudence

Harcèlement managérial et pouvoir disciplinaire. Cass. Soc. 12 juillet 2022 n°20-22.857 : certaines méthodes managériales et de travail peuvent être constitutives de harcèlement moral, communément appelé « harcèlement managérial ». Pour autant, le salarié qui en est l’auteur, ne peut être licencié pour faute grave dès lors que la société avait connaissance et approuvé de telles méthodes.

Preuve de l’impossibilité de reclassement du salarié inapte. CA Paris, 18 mai 2022, n°19/02933 : L’employeur doit justifier l’impossibilité de suivre les préconisations du médecin du travail afin de reclasser la salariée inapte qui occupait les fonctions de vendeuse à distance, sur un poste en télétravail. A défaut, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Inaptitude et reclassement. CE 19 juillet 2022, n°438076 : L’employeur a l’obligation de proposer au salarié déclaré inapte (en l’espèce un salarié protégé) les postes disponibles, quelle que soit la durée des contrats, CDI ou CDD. Si l’entreprise recourt à des intérimaires et que certains postes correspondant aux capacités du salarié sont à pourvoir, ils doivent lui être proposés, sous réserve de ne pas être d’une durée trop courte (2 -3 jours).

Inaptitude et indemnité spéciale de licenciement. Cass. soc. 6 juillet 2022, n°21-13200 : le refus par un salarié inapte à la suite d’un accident du travail du poste de reclassement proposé, n’est pas abusif dès lors que la proposition de reclassement entraîne une modification du contrat. Par conséquent, le salarié a droit à l’indemnité compensatrice de préavis et à l’indemnité spéciale de licenciement. Pour rappel, ces indemnités ne sont pas dues si l’employeur établit que le refus par le salarié du reclassement proposé est abusif. (Article L.1226-14)

Licenciement pour absence prolongée. Cass. soc., 6 juillet 2022, n°21–10 261 : Les absences prolongées ou répétées liées à la maladie peuvent justifier un licenciement si la situation objective de l’entreprise dont le fonctionnement est perturbé, le justifie. Le licenciement du salarié qui s’appuie sur la seule désorganisation de son service, est donc sans cause réelle et sérieuse.

Remarque : L’employeur a toutefois la possibilité de démontrer que la désorganisation du service, en raison de son caractère essentiel, entraîne la désorganisation de l’entreprise (Cass. Soc., 17 nov. 2021, n°20-14.848).

Licenciement pour motif économique. Cass. Soc., 21 sept. 2022, n°20-18.511 : L’évolution significative d’au moins un indicateur économique des difficultés économiques suffit à justifier le licenciement d’un salarié. En l’espèce, si la baisse des commandes et du chiffre d’affaires invoquée par l’employeur dans la lettre de licenciement n’était pas établie sur 3 trimestres consécutifs en comparaison avec la même période de l’année précédente, la baisse des capitaux devenus inférieurs à la moitié du capital social et le niveau d’endettement (7,5 millions d’euros), également invoqués dans ladite lettre, suffisaient à caractériser les difficultés économiques.

Protection de la salariée enceinte pendant un arrêt maladie. Cass. Soc., 14 sept. 2022, n°20-20.819 : L’arrêt maladie ne mentionnant pas l’existence d’un lien avec un état pathologique lié à la grossesse, ne permet pas à la salariée de
bénéficier de la protection absolue contre le licenciement, liée à sa maternité. Il en est ainsi même si la salariée produit, un an après les faits, un certificat de son médecin attestant que son arrêt maladie avait pour origine des difficultés liées à sa grossesse.

Remarque : L’arrêt de travail sur lequel la case « en rapport avec un état pathologique résultant de la grossesse » est cochée permet de bénéficier de la protection absolue du congé maternité (Cass. Soc., 16 déc. 2010, n°09-42.610).

Requalification de CDD en CDI. Cass. Soc., 14 sept. 2022, n°10-22.923 : La requalification de 416 CDD d’usage et de remplacement en contrat à durée indéterminée entraîne le paiement des rappels de salaire qui correspondent aux périodes interstitielles dès lors que le salarié prouve qu’il s’est tenu à la disposition permanente de l’employeur.

A travail égal, salaire égal. Cass. Soc., 14 sept. 2022, n°21-12.175 : La différence de diplôme ne justifie pas toujours la différence de salaire entre deux salariés. Il appartient à l’employeur de démontrer que le diplôme spécifiquement détenu atteste de connaissances particulières utiles à l’exercice de la fonction occupée.

Paiement du salaire et prise d’acte. Cass. Soc. 6 juillet 2022 n°20-21.690 : le non-paiement du salaire par l’employeur, même s’il ne s’agit que d’une seule mensualité, justifie une prise d’acte du salarié et engendre les conséquences d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. En l’espèce, le court retard (11 jours) entre la date d’exigibilité du salaire non honorée par l’employeur et la prise d’acte de la rupture par le salarié, était sans influence sur la gravité du manquement.

Droit à congés payés et preuve. Cass. Soc. 6 juillet 2022 n°21-12.223 : il appartient à l’employeur, d’une part, de prendre les mesures propres à assurer au salarié la possibilité de prendre ses congés et, d’autre part, de prouver qu’il a mis le salarié en mesure de prendre ses congés.

Prime de vacances prévue par la Convention collective Syntec. Cass. Soc., 14 sept. 2022, n°21-14.943 : La prime de 13ème mois dont une partie est versée pendant la période située entre le 1er mai et le 31 octobre et qui est prévue dans les contrats de travail des salariés, constitue un élément fixe de la rémunération annuelle qui ne peut être assimilée à une prime de vacances au sens de l’article 31 de la Convention collective Syntec. De même, quatre jours de congés supra-égaux ne peuvent être considérés comme constituant la prime de vacances Syntec.

Manquement à l’obligation de sécurité de l’employeur. Cass. Soc., 14 sept. 2022, n°21-10.608 : L’employeur doit assurer l’effectivité des visites médicales périodiques de ses salariés. L’omission d’une seule de ces visites médicales caractérise un manquement à son obligation de sécurité.

Niveau de consultation du CSE. Cass. Soc. 29 juin 2022 n°21-11.935 : la consultation sur un projet décidé au niveau central doit uniquement être effectuée auprès du CSE central. Les prérogatives consultatives des CSE d’établissement ne portent dans ce contexte que sur les mesures d’adaptation des décisions centrales spécifiques à l’établissement, lesquelles relèvent de la compétence des chefs d’établissement. En l’absence de pouvoir donné à ces derniers, les CSE d’établissement n’ont pas à être consultés, seul le CSE central doit l’être.

Consultation du CSE. Cass. Soc., 21 sept. 2022, n°20-23.660 : la consultation ponctuelle du CSE portant notamment sur la modification de l’organisation économique ou juridique de l’entreprise est autonome. Dès lors, elle n’est pas subordonnée à l’obligation de consulter préalablement le CSE sur les orientations stratégiques de l’entreprise.

Elections du CSE et loyauté des négociations du protocole d’accord préélectoral. Cass. Soc. 12 juillet 2022 n°21-11.420 : en l’absence d’accord électoraux entre l’employeur et les organisations syndicales sur la répartition des sièges et des salariés entre les différents collèges, il appartient au DREETS de procéder à une telle répartition, sous condition que les parties aient préalablement tenté de négocier loyalement. En l’occurrence, l’employeur n’avait pas communiqué certaines informations essentielles à la négociation (effectifs par site, classification des salariés) et transmis que tardivement l’actualisation de certaines données (la veille de la dernière réunion de négociation).



Réglementation



Loi 2022-1158 du 16 août 2022, JO du 17 août 2022, relative aux mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat.

Les employeurs ont un délai supplémentaire, soit jusqu’au 1er janvier 2023, pour mettre à jour les contrats collectifs souscrits avec les organismes assureurs et intégrer le maintien des garanties de protection sociale complémentaire (prévoyance, retraite supplémentaire) en cas de suspension du contrat de travail indemnisée.

Mesures relatives à l’épargne salariale

Pour soutenir le pouvoir d’achat des salariés, la loi prévoit un dispositif temporaire de déblocage anticipé et met également en place des mesures pérennes à l’image du régime de l’intéressement, en particulier :

▪ Jusqu’à la fin de l’année 2022, les salariés peuvent débloquer jusqu’à 10 000 euros au titre de la participation ou de l’intéressement.

La loi du 16 août 2022 a créé un nouveau cas de déblocage anticipé de la participation pour financer l’achat d’un ou plusieurs biens ou la fourniture d’une ou plusieurs prestations de services.
La demande peut être faite depuis le 18 août jusqu’au 31 décembre 2022 et concerne les sommes affectées avant le 1er janvier 2022 sur un PEE ou un PEI ou sur un compte courant bloqué.

▪ la mise en place d’un dispositif d’intéressement par voie unilatérale est étendue aux entreprises de moins de 50 salariés.

– Soit en l’absence de délégués syndicaux et de CSE ;
– Soit en cas d’échec des négociations n’aboutissant pas à la conclusion d’un accord.

Jusqu’alors, cette faculté était limitée aux entreprises de moins de 11 salariés.

▪ la durée maximale d’un dispositif d’intéressement passe de 3 à 5 ans,

▪ l’accord d’intéressement peut être renouvelé par tacite reconduction plusieurs fois,

▪ la durée du congé paternité et d’accueil de l’enfant est considérée comme du temps de présence dans le cadre de la répartition de l’intéressement en fonction du temps de présence, à l’égal des absences assimilées à du temps de présence (congé de maternité, congé d’adoption, congé de deuil, arrêt de travail pour accident du travail ou maladie professionnelle, mise en quarantaine dans le cadre d’épidémies),

▪ à compter du 1er janvier 2023, la procédure de contrôle des dispositifs d’intéressement, de participation et les plans d’épargne, est allégée.

La durée du contrôle de la conformité des accords et règlements est réduite à 3 mois (au lieu de 4). Le contrôle de forme effectué par la DDETS sera supprimé. Seul subsistera le contrôle de fond opéré par l’URSSAF.



Prime de partage de la valeur

Les employeurs peuvent verser une prime de partage de la valeur à tout ou partie de leurs salariés, le cas échéant selon des critères autorisés (rémunération, niveau de classification, présence effective pendant l’année écoulée, durée du travail, ancienneté dans l’entreprise) sur la base d’un accord collectif ou d’une décision unilatérale.

La prime bénéficie d’un régime d’exonération sociale et fiscale d’exception dans la limite de 3.000 euros (6.000 euros dans certains cas). Jusqu’à la fin 2023, et dans certaines limites, la prime est exonérée de CSG/CRDS et d’impôt sur le revenu pour les salariés payés moins de 3 SMIC.

Le versement peut être effectué en plusieurs fois, dans la limite d’un versement par trimestre.



Loi 2022-1158 du 16 août 2022, JO du 17 août 2022, de finances rectificative pour 2022 prévoyant la possibilité pour les salariés de monétiser leurs jours de repos.

La loi prévoit la possibilité pour les salariés, sous réserve de l’accord de l’employeur, de monétiser leurs journées ou demi-journées de repos acquises entre le 1er janvier 2022 et le 31 décembre 2025 en application :

− Soit d’un accord RTT antérieur à la loi n°2008-776 du 20 août 2008 maintenu ;

− Soit d’un accord d’aménagement du temps de travail sur une période inférieure à la semaine.

Les jours de repos non pris donnent alors lieu à une majoration de salaire correspondant a minima aux taux applicables aux heures supplémentaires, sans que cela s’impute sur le contingent y afférent. Cette majoration suit également le régime social et fiscal des heures supplémentaires, notamment les allègements récemment décidés.

Ce dispositif instauré par la loi de finances rectificative pour 2022 ne concerne pas les salariés en forfait-jours, lesquels bénéficient par ailleurs d’un dispositif de renonciation à jours de repos qui leur est propre (L. 3121-59 C. trav.).



Protection sociale complémentaire : allongement du délai de mise en conformité des accords collectifs Boss, Protection sociale complémentaire, § 1430,1er sept. 2022.

Jusqu’à cette date, le caractère collectif du régime (qui est une des conditions du régime social de faveur prévu par la législation) ne sera pas remis en cause, si l’entreprise applique bien les règles du maintien des garanties en cas de suspension du contrat de travail et qu’elle peut en attester en cas de contrôle (Boss, protection sociale complémentaire § 1430, 1er sept.2022).



Foire aux questions publiée le 5 septembre 2022 par le Ministère de la Transition énergétique relative au forfait mobilités durables.

La loi 2022-1157 de finances rectificative du 16 août 2022 a augmenté le plafond d’exonération de cotisations sociales et d’impôt des frais pris en charge par l’employeur engagés par les salariés lorsqu’ils se rendent sur leur lieu de travail avec des modes de transport respectueux de l’écologie.

La foire aux questions apporte des précisions sur ce forfait mobilité durable, son montant, ses modalités de prise en charge, les modes de transports éligibles ainsi que les justificatifs à fournir.