Flash Info Covid-19 N°8

Histoire (non exhaustive !) de délais.

De la succession des ordonnances sur les délais échus des procédures administratives en droit du travail (25 mars au 13 mai 2020), au cadre règlementaire qui accompagne la sortie programmée de l’état d’urgence sanitaire, ASCENT fait le point sur la fin annoncée de certaines mesures suspensives dans le domaine du droit social.

Par ailleurs et jusqu’au 23 août, les délais de consultation du CSE seront réduits, en application de l’ordonnance n°2020-507 du 2 mai 2020 et des Décrets d’application n°2020-508 et 509 du 2 mai 2020.

 

1. Retour sur la suspension des délais échus pour les procédures administratives pendant la période d’urgence sanitaire avec l’Ordonnance 2020-306 du 25 mars 2020 et les dérogations introduites par le Décret n°2020-471 du 24 avril 2020 dans le domaine du travail et de l’emploi

Le Décret n°2020-471 du 24 avril 2020 a dressé la liste des dérogations en matière sociale au principe de suspension des délais posé dans le cadre de la crise sanitaire du Covid-19, par l’Ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020. Consécutivement, leur cours a repris depuis le 26 avril 2020.

Retour sur une évolution en 3 étapes.

1ere étape : L’ordonnance n°2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période

L’Ordonnance du 25 mars 2020 a institué, pour les procédures administratives, un mécanisme qui prévoit de combiner, à la fois, suspension des délais qui ont commencé à courir et report pour les délais qui auraient dû commencer à courir :

• Les délais dans lesquels les décisions devaient être prises et qui n’avaient pas expiré le 12 mars 2020 ont été, à cette date, suspendus jusqu’au 24 juin 2020 (période d’urgence sanitaire augmentée d’un mois) ;

• Le point de départ des délais dans lesquels les décisions devaient être prises et qui auraient dû commencer à courir entre le 12 mars et le 24 juin 2020, a été reporté à l’issue de cette même période.

Cette suspension et ce report des délais étaient initialement circonscrits aux décisions et demandes administratives. L’absence de référence au Code du travail au visa de l’Ordonnance du 25 mars 2020, a laissé planer le doute sur l’application du mécanisme de suspension à d’autres actes ou délais spécifiques en droit du travail.

L’Ordonnance n°2020-427 du 15 avril 2020 est venue compléter le dispositif dérogatoire de suspension des délais.

2er étape : l’ordonnance n° 2020-427 du 15 avril 2020 portant diverses dispositions en matière de délais pour faire face à l’épidémie de Covid-19

L’Ordonnance rectificative du 15 avril 2020, relative à la prorogation des délais échus, a prévu la possibilité d’organiser, par décret, la reprise du cours des délais dans certains domaines du droit du travail et précisé que la suspension des délais organisée par l’Ordonnance n°2020-306 ne concernait pas les délais de réflexion, rétractation et renonciation, légaux et règlementaires (applicables notamment aux ruptures conventionnelles).

3ème étape : Le Décret n° 2020-471 du 24 avril 2020 portant dérogation au principe de suspensiondes délais pendant la période d’état d’urgence sanitaire liée à l’épidémie de covid-19 dans le domaine du travail et de l’emploi

Le Décret du 24 avril 2020 restaure un certain nombre de délais administratifs suspendus par l’ordonnance 2020-306 du 25 mars 2020 comme suit :
– les délais qui avaient commencé à courir avant le 12 mars 2020 et qui ont été suspendus à cette date, reprennent leur cours pour le temps restant à courir à compter du 26 avril ;
– les délais qui auraient dû commencer à courir entre le 12 mars et le 25 avril, commencent à courir à compter du 26 avril puisque leur point de départ a été reporté du fait de la suspension précitée.

Le détail des délais dont le cours a repris, est reproduit sous forme de tableau en annexe du Décret n°2020-471 du 24 avril 2020, que nous avons joint au présent Flash Info.

En synthèse et de manière non exhaustive, on retiendra :

Rupture du contrat de travail
– la validation ou l’homologation par l’autorité administrative de l’accord collectif relatif au plan de
– sauvegarde de l’emploi, y compris pour les entreprises en redressement ou en liquidation judiciaire ;
– l’homologation de la rupture conventionnelle ;
– la notification de la décision de validation par l’autorité administrative d’un accord collectif portant rupture conventionnelle collective.

• Durée et aménagement du temps de travail
– l’instruction par l’autorité administrative de la demande de dérogation à la durée maximale hebdomadaire absolue du travail ou à la durée maximale hebdomadaire moyenne ;
– la notification de la décision de l’inspecteur du travail d’autoriser le recours aux horaires individualisés ;
– la décision de l’inspecteur du travail sur la demande d’autorisation de dépassement de la durée maximale quotidienne de travail ;
– la décision de l’inspecteur du travail sur la demande de dérogation à la durée minimale de repos quotidien.

• Santé et sécurité au travail
– la mise en demeure de l’employeur par la Direccte constatant que le travailleur est soumis à une situation dangereuse ;
– la mise en demeure de l’employeur par l’inspection du travail pour se conformer aux prescriptions des décrets mentionnés aux articles L. 4111-6 (mesures générales ou particulières de santé et sécurité, évaluation des risques, information des salariés sur les risques et formation des salariés à la sécurité) et L. 4321-4 (équipements de travail et moyens de protection) ;
– la demande de procéder à la vérification des équipements de travail et moyens de protection.

 

2. Vers une reprise des délais de procédure prévue par l’Ordonnance n°2020-560 du 13 mai 2020

Initialement fixée au 24 mai 2020, la fin de l’état d’urgence sanitaire a été prorogée jusqu’au 10 juillet 2020 par la Loi n°2020-546 du 11 mai 2020. En matière sociale, l’ordonnance n°2020-560 du 13 mai 2020 neutralise certains effets du report de la fin de l’état d’urgence, dans les domaines suivants.

Les délais applicables au recouvrement des cotisations et contributions sociales non versées à leur date d’échéance, de contrôle et du contentieux subséquents

Ces délais sont suspendus entre le 12 mars 2020 et le 30 juin 2020 inclus.

Ils reprennent donc leurs cours au 1er juillet 2020. A cette date, les organismes de recouvrement des

régimes obligatoires de sécurité sociale ainsi que Pôle emploi retrouvent leurs moyens d’action et prérogatives.

A noter toutefois que le rapport lié à l’ordonnance n°2020-560 du 13 mai 2020 précise que la stratégie de reprise du recouvrement pourra être affinée avec le réseau en fonction des remontées terrain pour une mise en oeuvre mesurée et adaptée du recouvrement forcé.

Les délais de suspension ou de report des élections du CSE

Les échéances sont fixées au 31 août 2020 et sont décorrélées de la date de fin de l’état d’urgence.

On rappellera en effet que l’ordonnance n° 2020-389 du 1er avril 2020 avait prévu,
– d’une part, la suspension des processus électoraux en cours jusqu’à un délai de trois mois à compter de la fin de l’état d’urgence sanitaire,
– d’autre part, le report des processus électoraux à engager, dans un délai de trois mois à compter de la fin de l’état d’urgence sanitaire.

En conséquence,

Les processus électoraux en cours au 3 avril, sont suspendus, rétroactivement, à compter du 12 mars, et le resteront jusqu’au 31 août 2020.

L’ensemble des délais spécifiques aux processus électoraux, ainsi que ceux concernant l’intervention de la Direccte en cette matière sont concernés : nombre et périmètre des établissements distincts définis par l’employeur, répartition du personnel et des sièges entre les collèges électoraux…

Les employeurs (en retard) qui étaient tenus d’organiser des élections avant le 3 avril 2020 ou qui y sont tenus entre le 3 avril et le 23 mai, devront engager le processus électoral entre le 24 mai et le 31 août 2020 inclus.

Pour les élections partielles : lorsque les conditions des élections partielles sont réunies entre le 3 avril 2020 et le 31 août 2020 inclus, elles doivent être organisées à l’initiative de l’employeur entre le 24 mai et le 31 août 2020, sans que cette date ne puisse être antérieure à la date à laquelle il lui est fait obligation d’engager le processus électoral.

 

3. Des délais de consultation du CSE réduits jusqu’au 23 août 2020 par l’Ordonnance n°2020-507 du 2 mai 2020 et par les Décrets n°2020-508 et 509 du 2 mai 2020

Les délais des procédures d’information et consultation du CSE, lorsque celles-ci portent “sur les décisions de l’employeur ayant pour objectif de faire face aux conséquences économiques, financières et sociales de propagation de l’épidémie de Covid-19“, sont réduits à compter de la publication de l’ordonnance, soit du 3 mai 2020, et jusqu’au 23 août 2020.

Son périmètre est donc large. Sont exclues de ces délais réduits :
➢ les informations et consultations concernant les PSE,
➢ les informations et consultations concernant les accords de performance collective (NB : précision étonnante de l’ordonnance car la consultation du CSE n’est pas prévue en cas de conclusion d’un accord collectif),
➢ les informations et consultations récurrentes sur les orientations stratégiques, la situation économique et financière de l’entreprise et la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi.

Sont concernés les délais relatifs :

à l’ordre du jour de la réunion du CSE et des CSE d’établissement qui est de deux jours avant la réunion, au lieu de trois jours habituellement (article L.2315-30 du code du travail) ; lorsque l’entreprise est dotée d’un CSE central, il est communiqué trois jours avant la réunion, au lieu de huit jours habituellement (article L.2316-17 du code du travail) ;

à la consultation du CSE, qui est réduit à huit jours au lieu d’un mois, en l’absence d’intervention d’un expert.
Avec l’intervention d’un expert, le délai est réduit de deux mois à 12 jours pour le CSE central et à 11 jours pour les CSE et CSE d’établissement. Ce délai reste de 12 jours lorsque plusieurs expertises se déroulent au niveau du CSE central et dans un ou plusieurs établissements, alors que le délai est normalement porté à trois mois. Lorsque la consultation concerne à la fois un ou plusieurs CSE et le CSE central, l’avis de chaque CSE d’établissement doit être rendu et transmis dans un délai d’un jour au lieu de sept jours avant la date à laquelle le CSE central est réputé avoir été consulté.

à la réalisation des expertises
L’expert dispose de 24 heures, au lieu de trois jours, pour demander à l’employeur toutes les informations complémentaires qu’il estime nécessaire. L’employeur a 24 heures, au lieu de cinq jours, pour lui répondre.

Le délai imparti à l’expert pour notifier à l’employeur le coût prévisionnel, l’étendue et la durée de l’expertise passe de 10 jours à 48 heures à compter de sa désignation ou 24 heures à compter de la réponse apportée par l’employeur à une demande qui lui a été adressée.
Le délai donné à l’employeur pour saisir un juge s’il entend contester l’expertise passe de 10 jours à 48 heures.
Enfin, l’expert doit remettre son rapport 24 heures avant l’expiration du délai de consultation, et non plus 15 jours avant.

Ces nouveaux délais pourront s’appliquer aux procédures de consultation en cours, à condition d’interrompre cette dernière et d’engager une nouvelle procédure avec les nouveaux délais réduits.