Newsletter N°11 et 12 – Novembre-Décembre 2019

Jurisprudence :

  • Pouvoir disciplinaire. Cass. soc., 23 octobre 2019 —
  • Congé parental et discrimination. Cass. soc., 2 octobre 2019 —
  • Contrat de travail apparent. Cass. soc., 06 novembre 2019 —
  • Harcèlement. Cass. Soc. 27 novembre 2019 —
  • Harcèlement. Cass. Crim. 26 novembre 2019 —
  • Prise d’acte de la rupture. Cass. soc., 27 novembre 2019 —
  • Notification du licenciement. Cass. soc., 27 novembre 2019 —
  • Obligation de reclassement. Cass. soc., 27 nov. 2019 —
  • Obligation de reclassement. Cass. soc., 11 décembre 2019 —
  • Vidéosurveillance. CEDH 17 octobre 2019 —
  • Vidéosurveillance. Cass. soc., 11 décembre 2019 —
  • Convention de forfait-jours. Cass. Soc., 16 octobre 2019 —
  • Exécution du mandat représentatif. Cass. Soc. 23 octobre 2019 —
  • Garantie d’emploi. Cass. soc., 18 décembre 2019 —
  • Rupture du contrat de travail. Cass. soc., 11 décembre 2019 —
  • Durée du travail. Cass. soc., 18 décembre 2019 —
  • Contrôle des risques psychosociaux. Cass. soc., 14 novembre 2019 —
  • Elections du CSE. Cass. soc., 11 décembre 2019 —
  • Harcèlement moral institutionnel. Tribunal Correctionnel de Paris 20 décembre 2019 : Arrêt France Télécom —

 

Dispositions légales et règlementaires :

  • L’indemnisation des démissionnaires —
  • Les risques et sanctions à défaut de mise en place du CSE au 1er janvier 2020, Ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 relative à la nouvelle organisation du dialogue social et économique dans l’entreprise et favorisant l’exercice et la valorisation des responsabilités syndicales —
  • L’application du bonus-malus relatif aux contributions de chômage, Décret n° 2019-797 du 26 juillet 2019 relatif au régime d’assurance chômage —
  • Titre-restaurant. Limite d’exonération 2020 —
  • Smic Horaire. Revalorisation 2020 —
  • Réforme des retraites —
  • La Loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 —

 

Jurisprudence

Pouvoir disciplinaire. Cass. soc., 23 octobre 2019, n°17-28.448, F-D Sté Michel Nicolas c/ S :

L’employeur ne peut pas consulter les conversations d’un salarié tenues sur une messagerie instantanée personnelle, même installée sur un ordinateur professionnel, sans méconnaître le secret des correspondances.

 

Congé parental et discrimination. Cass. soc., 2 octobre 2019, n°18-15.682 F-D, M/. C/Sté Kiosque d’Or :

Le non-respect par l’employeur de l’obligation de réintégrer une salariée au poste qu’elle occupait au retour d’un congé parental d’éducation, peut constituer une discrimination indirecte fondée sur le sexe. La Cour de cassation s’aligne sur la jurisprudence européenne (CJUE 08 mai 2019, aff 486/18).

 

Contrat de travail apparent. Cass. soc., 06 novembre 2019, n°18-19.853 F-D :

En présence de bulletins de paie sur lesquels figuraient des prélèvements sociaux, ce dont il résulte l’existence d’un contrat de travail apparent, il appartient à l’employeur de démontrer qu’en réalité, il n’y a pas de contrat de travail.

 

Harcèlement. Cass. Soc. 27 novembre 2019, n°18-10.551 :

Une enquête doit systématiquement être menée en cas de dénonciation de faits de harcèlement.
L’employeur qui ne diligente pas une enquête après la dénonciation de faits de harcèlement par un salarié manque à son obligation de prévention, et ce, même si les faits ne sont pas établis.

 

Harcèlement. Cass. Crim. 26 novembre 2019, n°19-80360 :

Le salarié qui dénonce des agissements de harcèlement moral ou sexuel bénéficie d’une protection contre les poursuites pénales pour diffamation publique. Toutefois, s’il diffuse ces accusations à d’autres personnes que l’employeur et les organes chargés de veiller à l’application du Code du travail, des poursuites pour diffamation redeviennent envisageables.

 

Prise d’acte de la rupture. Cass. soc., 27 novembre 2019, n°17-31.258, H. c/Crédit mutuel enseignant d’Aix Marseille :

En cas de prise d’acte de la rupture du contrat de travail, le point de départ de la prescription de l’action en justice se situe à la date de la rupture et non à la date des manquements de l’employeur. Pour rappel, la prescription qui était de 2 ans, a été réduite à 12 mois depuis les Ordonnances Macron (23 septembre 2017).

 

Notification du licenciement. Cass. soc., 27 novembre 2019, n°18-15.195 :

Le point de départ du délai d’un mois pour notifier un licenciement disciplinaire doit être fixé à la date prévue pour le premier entretien préalable, si celui-ci a été reporté de la seule initiative de l’employeur. Par conséquent, le licenciement notifié plus d’un mois après ce premier entretien est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

 

Obligation de reclassement. Cass. soc., 27 nov. 2019, n° 18-16.985 F-D :

L’employeur manque à son obligation de loyauté lorsqu’il propose au salarié à titre de reclassement le même poste précédemment refusé dans le cadre de la proposition de modification du contrat de travail, en y ajoutant des conditions plus défavorables (rétrogradation catégorielle, rémunération inférieure et temps de travail supérieur)

 

Obligation de reclassement. Cass. soc., 11 décembre 2019, n°17-31.673 FS-D :

Le juge judiciaire demeure compétent pour apprécier le respect par l’employeur de l’obligation individuelle de reclassement. En revanche, le contrôle du contenu du plan de reclassement intégré au plan de sauvegarde homologué par l’autorité administrative, relève de la compétence exclusive de la juridiction administrative.

En conséquence, le juge judiciaire n’est pas compétent pour l’examiner à l’occasion d’une action individuelle devant la juridiction prud’homale, en vertu du principe de l’autorité de la chose décidée par l’autorité administrative.

 

Vidéosurveillance. CEDH 17 octobre 2019, n°1874/13 et 8567/13 :

Le recours à la vidéosurveillance des salariés, sans les en avoir informés au préalable, utilisation actuellement interdite en France, a été validé par la Cour Européenne des Droits de l’Homme. L’existence de soupçons raisonnables d’irrégularités graves commises par des caissières de supermarchés et l’ampleur des manquements constatés, ont justifié l’absence d’information préalable au placement des salariées concernées sous vidéosurveillance.

 

Vidéosurveillance. Cass. soc., 11 décembre 2019, n°17-24.179 FS-D :

Le licenciement d’un salarié ne saurait être jugé sans cause réelle et sérieuse au motif que la preuve de sa faute, établie par un enregistrement vidéo, ne lui était pas opposable faute pour l’employeur d’avoir porté à sa connaissance ce dispositif de contrôle. Les juges doivent nécessairement constater que le système de vidéosurveillance avait été utilisé pour contrôler le salarié dans l’exercice de ses fonctions.

 

Convention de forfait-jours. Cass. Soc., 16 octobre 2019, n°18-16539 :

A défaut d’avoir soumis au salarié une nouvelle convention individuelle de forfait en jours, postérieurement à l’avenant à la convention collective ayant sécurisé le dispositif de forfait-jours, l’employeur ne peut se prévaloir des dispositions de cet avenant. Ainsi, la convention de forfait-jours du salarié, fondée sur les dispositions de la convention collective antérieures à l’avenant, est nulle.

 

Exécution du mandat représentatif. Cass. Soc. 23 octobre 2019, n°17-28429 :

Lorsqu’un salarié, sous couvert d’un mandat de délégué du personnel, impose sa présence lors d’un entretien informel avec un salarié, et le perturbe, l’existence d’un abus dans l’exercice du mandat justifie une mesure de mise à pied disciplinaire.

 

Garantie d’emploi. Cass. soc., 18 décembre 2019, n°18-18.864 FS-PB :

Le licenciement d’un salarié malade prononcé pendant la période de garantie d’emploi est abusif même si l’employeur s’est fondé sur la perturbation qu’entraînait l’absence prolongée de la salariée nécessitant son remplacement définitif.

 

Rupture du contrat de travail. Cass. soc., 11 décembre 2019, n°18-17.707 et n°18-23.388 :

Dans le cas d’un licenciement économique assorti d’une proposition de CSP, la mention du délai de contestation de la rupture du contrat de travail ou son motif ne doit pas obligatoirement résulter d’un courrier rédigé par l’employeur. Il peut être intégré dans un document de l’UNEDIC.

 

Durée du travail. Cass. soc., 18 décembre 2019, n°18-12.643 :

Lorsque le contrat de travail à temps partiel ne mentionne ni la durée du travail ni sa répartition, la présomption d’emploi à temps complet peut être renversée si l’employeur rapporte la preuve de la durée exacte de travail convenue et établit la mise en place d’une organisation du travail spécifique pour la salariée.

 

Contrôle des risques psychosociaux. Cass. soc., 14 novembre 2019 n° 18-13.887 FS-PB, Sté Chubb France c/ CHSCT de la société Chubb France :

Le juge judiciaire reste compétent pour apprécier les risques psychosociaux consécutifs à la mise en œuvre d’un projet de restructuration dans le cadre d’un PSE (Plan de Sauvegarde de l’Emploi) validé par l’administration et pour suspendre ledit projet.

 

Elections du CSE. Cass. soc., 11 décembre 2019, n°18-23.513 / 18-26.568 / 19-10.855 / 19-13.037 / 19-10.826 :

Lorsque l’application des règles de proportionnalité et d’arrondi issues du dispositif de représentation équilibrée femmes/hommes conduit à ce qu’un sexe ait droit à moins de 0,50 candidat (c’est-à-dire aucun candidat), les organisations syndicales ne sont pas tenues de faire figurer sur leurs listes un candidat du sexe minoritaire.

 

Harcèlement moral institutionnel. Tribunal Correctionnel de Paris 20 décembre 2019 : Arrêt France Télécom

Les anciens dirigeants de France Télécom (ex-PDG, ex-n°2, ex-DRH) ont été condamnés à un 1 an de prison dont 8 mois avec sursis et 15 000 euros d’amende, pour avoir mis en place une politique de réduction des effectifs sur la période 2007-2008. L’entreprise a été condamnée à l’amende maximale soit 75 000 euros.

Les moyens choisis pour atteindre l’objectif fixé de 22 000 départs ayant pour objet de dégrader les conditions de travail des agents afin d’accélérer leurs départs avec pour conséquence un climat anxiogène, ont été qualifiés d’interdits.

 

 

Dispositions légales et réglementaires

 

Les risques et sanctions à défaut de mise en place du CSE au 1er janvier 2020, Ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 relative à la nouvelle organisation du dialogue social et économique dans l’entreprise et favorisant l’exercice et la valorisation des responsabilités syndicales

A partir du 1er janvier 2020, les mandats des anciennes instances représentatives du personnel prennent automatiquement fin et des élections en vue de mettre en place un CSE doivent avoir été organisées dans toutes les entreprises de plus de 11 salariés.

A défaut, le Code du travail prévoit une peine d’un an d’emprisonnement et une amende de 7 500 € pour entrave à la constitution du CSE ou à la libre désignation de ses membres.

En outre, tout salarié serait en droit de réclamer l’allocation de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de l’absence de représentation du personnel. Il en va de même s’agissant des organisations syndicales qui pourraient solliciter l’organisation des élections.

 

L’application du bonus-malus relatif aux contributions de chômage, Décret n° 2019-797 du 26 juillet 2019 relatif au régime d’assurance chômage

Afin d’encourager les entreprises à proposer davantage de CDI ou à prolonger la durée des CDD, un dispositif est mis en place à partir du 1er mars 2021 dans les entreprises de plus de 11 salariés, appartenant à l’un des 7 secteurs connus comme présentant le plus grand nombre de fins de contrats de travail, à savoir :

  • La fabrication de denrées alimentaires, de boissons et de produits à base de tabac ;
  • Des autres activités spécialisées, scientifiques et techniques ;
  • Hébergement et restauration ;
  • Production et distribution d’eau-assainissement, gestion des déchets et dépollution ;
  • Transports et entreposage ;
  • Fabrication de produits en caoutchouc et en plastique, et d’autres produits non métalliques ;
  • Travail du bois, industrie du papier et imprimerie.

Le bonus-malus sera calculé à partir des fins de contrat de travail ou de missions d’intérim constatées entre le 1er janvier et le 31 décembre 2020.

Ce mécanisme prévoit la modulation des contributions chômage patronales, qui seront minorées ou majorées en fonction de la comparaison entre le taux de séparation médian du secteur et le taux de séparation de l’entreprise.

 

Titre-restaurant. Limite d’exonération 2020

La limite d’exonération de la part patronale au financement des titres-restaurant est portée à 5,55 euros à compter du 1er janvier 2020.

 

Smic Horaire. Revalorisation 2020

Le SMIC est porté à 10,15€ brut par heure et le minimum garanti à 3,65€ au 1er janvier 2020. Le SMIC mensuel brut passe ainsi de 1.521,22€ à 1.539,42€.

 

Réforme des retraites

Présentation des grandes lignes de la réforme :

  • Un système universel, par répartition et à points, couvrant les revenus des actifs percevant annuellement jusqu’à trois plafonds annuels de la sécurité sociale (123 408€ en 2020) ;
  • Une nouvelle gouvernance courant 2020 et au plus tard le 1er janvier 2021 ;
  • Un âge « d’équilibre » de départ à la retraite fixé à 64 ans en 2027 au plus tard, assorti d’un système de bonus-malus [avec des « marges de manœuvre pour parvenir à l’équilibre financier à prévoir] ;
  • L’attribution de points de solidarité pour compenser les périodes de maladie et de chômage ;
  • Une pension minimale de 85% du Smic net (minimum qui évoluera comme le Smic) ;
  • Le maintien des dispositifs de départ anticipé pour pénibilité et carrière longue

Les Français nés avant 1975 « ne seront pas concernés » par la réforme du système de la retraite et « la génération 2004 » serait la première à intégrer le « système universel ».

Un projet de loi devrait être soumis au Conseil des Ministres le 24 janvier 2020 avant d’être discuté au Parlement à la fin du mois de février.

 

La Loi de financement de la sécurité sociale pour 2020

La publication de la loi de finance de la sécurité sociale pour 2020, retardée par la saisine du Conseil Constitutionnel, est intervenue le 27 décembre 2019. En vigueur à compter du 1er janvier 2020, ses principales mesures sont les suivantes :

  • La reconduction, assortie d’aménagements de la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat (1) ;
  • La dématérialisation du paiement des cotisations et contributions sociales pour les entreprises d’au moins 150 salariés ;
  • Le relèvement du barème de compétitivité renforcée dans les départements d’Outre-Mer ;
  • La suppression du délai de carence en cas de temps partiel thérapeutique ;
  • La suppression de la condition d’un an d’ancienneté requise pour bénéficier du congé de proche aidant (2)

 

1) Le renouvellement du dispositif de la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat

Attention : le dispositif est modifié !

La loi de finance prévoit cette année encore la possibilité de verser une prime exceptionnelle de pouvoir d’achat aux salariés.

Cette prime est totalement exonérée d’impôt sur le revenu et de toutes les cotisations sociales dans la limite de 1000 € par bénéficiaire, à condition que celui-ci perçoive une rémunération brute annuelle inférieure à 54 765€ (3 fois la valeur annuelle du Smic 2019).

La nouveauté réside dans le fait que les avantages sociaux et fiscaux de cette prime sont conditionnés par la mise en place par l’employeur d’un accord d’intéressement, qui exceptionnellement pourra être annuel, et non triennal. Cette condition ne s’applique toutefois pas aux associations et fondations à but non lucratif, reconnues d’utilité publique.

Les autres conditions pour bénéficier de cette exonération d’impôt sont les suivantes : la prime doit être versée entre le 1er janvier 2020 et le 30 juin 2020. La nature du contrat de travail, la durée du travail et l’ancienneté dans l’entreprise ne peuvent être prise en compte pour l’attribution de celle-ci. Toutefois, le montant de la prime peut être modulé en fonction de critères tels que la rémunération, le niveau de classification, la durée de travail prévue au contrat ou encore la durée de présence effective au cours de l’année 2019.

 

2) L’indemnisation du congé de proche aidant

Le recours aux congés de proche aidant est facilité. Les bénéficiaires du congé, qui ne devront plus avoir un an d’ancienneté, pourront percevoir une allocation journalière pour les jours de congés pris à ce titre. Le montant de l’allocation pourra être modulé si le congé est pris de manière fractionnée ou s’il est transformé en période d’activité à temps partiel. Le dispositif sera précisé par décret, lequel entrera en vigueur au plus tard le 30 septembre 2020.